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Trahisons glacées à la Madeleine

Hélène Kuttner 6 février 2020
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©Stephane_Brion

L’acteur et metteur en scène Michel Fau, qui nous a habitués à de flamboyantes découvertes, monte cette pièce de Pinter et partage le plateau avec Roschdy Zem et Claude Perron dans des curieux décors des années 70. Malgré la présence animale des comédiens, la mise en scène ne parvient pas à captiver notre attention et à basculer dans le trouble.

Vaudeville à rebours

Un trio, avec une femme, Emma, son mari et son amant Jerry, tous trois embarqués depuis cinq ans dans une trahison conjugale en n’étant la dupe de personne. Harold Pinter tricote donc, avec une précision d’horloger suisse et un humour aussi noir qu’anglais, corrosif à souhait, le récit rétrospectif de cette construction chez des couples qui vivent au milieu des livres et travaillent soit à écrire, soit à publier. Dans un Londres des années 1970 gagné par la liberté sexuelle, les voyages et l’hédonisme des salles de squash et des whiskies on the rocks, le mensonge devient un mode de vie alors que les conventions bourgeoises semblent encore résister, laissant les personnages flotter entre passion et insatisfaction.  

Mise en scène distanciée

©Stephane_Brion

Sans doute trop respectueux des dialogues énigmatiques et syncopés de Pinter, Michel Fau a dirigé les comédiens de manière très formelle, en laissant très peu d’espace à l’imaginaire du spectateur pour tenter de percer à jour les sentiments et l’ambiguïté de chacun des personnages. Dans un décor graphique aux nombreuses peintures de chasse, des lumières acidulées de vert et d’orange vif, Claude Perron, qui apparaît dans des robes impressionnantes, est la maîtresse du jeu, amante de l’éditeur à succès Jerry, incarné par Roschdy Zem, racé et élégant, tandis que Michel Fau joue le mari faussement désabusé dans son peignoir de soie gris souris. Le problème est qu’ils demeurent tous dans l’apparence affirmée d’un personnage, sans que jamais ne surgisse le trouble d’une interrogation, d’un mystère qui puisse faire vriller les contours à la mesure des silences et des quiproquos. On reste donc malheureusement sur sa faim, malgré la qualité des acteurs et la saveur du texte. Un spectacle qui trouvera certainement plus de fantaisie avec le temps des représentations.

Hélène Kuttner

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